Qui était Titien ?
Titien, artiste au tempérament fougueux et à la production abondante, domine la peinture vénitienne du XVIe siècle. Il chemine de la figuration « naturaliste » à une exaltation intérieure, en passant par le classicisme puis par le maniérisme. Il s’inscrit comme peintre de la beauté, de la joie et du drame et élabore un art de la couleur, éclatante, servi par une technique sûre et aisée.
Titien exécute des fresques, des toiles et des panneaux peints, de divers formats. Les sujets religieux sont commandés par le clergé à Venise, Padoue, Parme, Mantoue, Ancône notamment, les œuvres mythologiques et les portraits, par les princes italiens à Mantoue, Ferrare, Urbino, Rome. Les doges de Venise, les grands d’Europe (Charles Quint, Philippe II d’Espagne, François Ier), puis les papes et cardinaux romains (Paul III, le cardinal Famèse) sont ses commanditaires.
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Il admire Giovanni Bellini et Giorgione à Venise, Giotto à Padoue. Il s’inspire de Michel-Ange à Rome, du maniérisme vénitien de G. Vasari et de celui de G. Romano (Jules Romain) vu à Mantoue, puis aborde de nouvelles formes personnelles d’expression.
Ses œuvres de jeunesse témoignent d’une fougue et d’une propension au drame, mis en scène avec un naturalisme qui appartient encore au XVe siècle.
Les éléments formels sont largement rythmés, en harmonie avec la nature vivante. Titien innove par sa conception spatiale et chromatique ; il campe avec assurance des figures aux raccourcis hardis, structure les formes grâce à la couleur intense et contrastée avec un métier rigoureux. Ses portraits psychologiques s’articulent en plans simples.
Inspiré dans un premier temps par l’art de Giorgione, Titien construit son propre classicisme, majestueux, tendu vers l’équilibre supérieur de la composition par un rythme formel, ample et solennel.
L’Être humain (beauté féminine et mythique idéale ou personnages épanouis et sereins) entre en harmonie intime et lyrique avec le paysage paisible qui l’environne.
La couleur tendre et lumineuse de Giorgione s’enrichit de la pureté de Giovanni Bellini.
Puis l’artiste évolue vers un naturalisme illusionniste vivant et fougueux. Le nouveau classicisme chromatique aux couleurs vives, au métier libre et audacieux, trouve surtout son origine chez Michel-Ange. Dans les sujets antiques, Titien privilégie la joie dionysiaque aux dépens de l’approche apollinienne. Il enrichit les compositions religieuses, devenues grandioses et mouvementées, accroît le caractère dramatique et mortel de la condition humaine. Il exalte la beauté féminine, intimiste et «familière» ; son idéal de beauté devient réalité humaine. Pourtant ses portraits peuvent accentuer les éléments de faste et de majesté.
De 1515 à 1542, il travaille plus que tout la technique de la couleur; il superpose de nombreuses couches, fines ou épaisses, recouvertes au final d’un vernis coloré de vert, bleu ou rouge.
Par le broiement fin des pigments, il obtient une nouvelle gamme chromatique dont il exploite les transparences; la couleur des couches profondes diffère de celle vue par l’œil, à la surface de la toile.
Titien évolue vers une technique plus sobre à partir de 1542 ; il utilise moins de pigments, mais multiplie le nombre de couches (jusqu’à quinze pour les roses rares). Il pose la dernière couche au doigt plus souvent qu’au pinceau.
Après son séjour romain, l’inquiétude maniériste, le goût des couleurs violentes et des formes étirées tentent le peintre.
Il substitue à la mythologie heureuse et à la sensualité féminine des œuvres de la maturité, les thèmes dramatiques et morbides, les valeurs profondes de l’être, l’intérêt des passions.
La tension plastique et le contraste des couleurs s’expriment dans un style mouvementé et violent. Comme une vague déferlante, la couleur du tableau déconstruit l’oeuvre d’art.
Les coulées de matières lumineuses, dorées, rougeoyantes ou blanchâtres ébranlent les figures. Il réserve les teintes chaudes pour la passion, les teintes froides pour la souffrance. Ses portraits fixent la vérité du caractère, dans sa crudité.
Titien connaît, de son temps, un succès qui s’étend des duchés italiens à toutes les cours européennes.
Artiste de la Renaissance et «réalisateur» du classicisme vénitien, Titien assoit le règne de la couleur et des grands coloristes.
Il renouvelle la conception de la beauté idéale en créant la Vénus d’Urbin, restée comme le modèle de nu de toute l’histoire de la peinture. Il conçoit un des premiers nus expressifs ( Saint Sébastien).
La beauté féminine, autrefois idéalisée, devient familière et humaine. Titien renouvelle les sujets mythologiques, l’Iconographie traditionnelle (sa dernière Annonciation) et la représentation des sujets antiques.
Ses modèles posent dans de nouvelles attitudes, non conformistes, parfois désinvoltes ( l’Arétin).
Il apporte à la technique de la couleur une complexité inégalée jusqu’à lui, qu’il fera évoluer vers plus de sobriété, à mesure qu’il en dominera davantage la texture, la matière et surtout les pigments.
La déstructuration de la forme par la couleur génère une sensation physique, de chaleur, presque palpable.